Améliorer son storyboard

Le storyboard est une étape essentielle dont j’ai déjà parlé plusieurs fois (ici, un peu ici, ici et ici par exemple). Petit retour par l’exemple sur une page future de La Prépa.

L’idée du storyboard est assez simple : plus on revient sur une page, plus elle va s’améliore en termes de mise en page et de narration. J’ai plusieurs objectifs en tête à chaque fois :

  • Une narration la plus fluide possible dans la page et entre les pages
  • Une variété graphique et éviter la répétition des mêmes plans et expressions des personnages.

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Bilan de l’exposition 3

Une fois que tout est prêt, il ne restait plus qu’à attendre notre public. S’ensuit l’attente des personnes et l’espérance des ventes…

Quel public ?

Qui viendra à notre exposition ? Le fait qu’elle se passe à Lagny-sur-Marne est le premier souci. Excentré dans le 77, le Welcome Bazar n’est pas le lieu le plus accessible de la région parisienne. Ainsi, on comprend dès les débuts de l’organisation que l’on aura droit au public local. Donc un public qui sera venu boire un verre ou manger au Welcome Bazar et qui n’est pas fan de BD ou d’illustration. Continuer la lecture de « Bilan de l’exposition 3 »

Bilan de l’exposition 2

Une fois les illustrations terminées, le boulot est loin d’être fini ! Il faut préparer l’exposition pour en profiter au mieux.

LES GOODIES

Une exposition, comme son nom l’indique, c’est s’exposer. L’idée n’est pas que de vendre, mais aussi de se montrer et pouvoir atteindre un nouveau public. Il faut donc, au-delà des tableaux, proposer autre chose à acheter ou à récupérer pour qu’après l’événement, des lecteurs aient été gagnés. Continuer la lecture de « Bilan de l’exposition 2 »

Bilan de l’exposition 1

Il m’aura fallu quelques jours pour récupérer et digérer (aux sens propre et figuré) l’exposition MÉT4MORPHOSES. Il est l’heure de tirer le premier bilan de ce qui restera ma première exposition.

Se penser illustrateur

Pourquoi une exposition ? C’est suite à l’exposition Azhar de Stoon au Welcome Bazar que ce dernier me propose d’exposer à mon tour là-bas. Cependant, plusieurs facteurs m’effraient :

  • Le manque de qualité de mes illustrations
  • Le petit format de mes illustrations
  • La quantité d’illustrations à fournir (plus de quarante) pour garnir la galerie
  • L’investissement financier dans l’achat des cadres (plus de quarante)
  • La peur de ne rien vendre et que cela me déprime.

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Bilan 2017

C’est un incontournable fin décembre : je vous présente le bilan de l’année écoulée. Prendre le temps de regarder dans la rétroviseur et jeter un œil sur le travail accompli, avant de se projeter vers ce qui m’attend dans les prochains mois ! Et contrairement aux années précédentes, il y a des projets qui ont pris fin ! Ouf !

2017 aura été avant tout l’année où j’ai terminé Jotunheimen. Même si, techniquement, le livre n’est pas réellement fini et publié, les planches et l’histoire sont bouclées. Je vous invite à lire les post-mortem pour en savoir plus ici et ici. Continuer la lecture de « Bilan 2017 »

Travailler les fondamentaux du dessin

Actuellement, je suis dans une période de creux. Ce terrible espace-temps entre deux projets BD peut être dévastateur pour l’auteur. Il faut d’abord finaliser l’ancien projet (à savoir l’éditer) et oser commencer la première planche du nouveau… Heureusement pour moi, un projet d’expo m’oblige à repousser La Prépa. C’est donc l’occasion de travailler sur le dessin en attendant. Continuer la lecture de « Travailler les fondamentaux du dessin »

Jotunheimen – Post-mortem (2)

Après l’analyse du scénario, il me fallait passer au crible le dessin de Jotunheimen. De sacrés défis m’attendaient, ont-ils été relevés ?

Les ambitions

Lorsque j’ai écrit le scénario de Jotunheimen, je ne me suis pas mis de frein. Je voulais qu’il me pousse à dessiner des scènes qui me semblaient hors de portée de mon crayon. Chaque projet se doit de me faire progresser en dessin par de nouvelles ambitions.

Les difficultés envisagées pour Jotunheimen étaient les suivantes :

  • dessiner de grands paysages de montagne
  • dessiner des personnages plus réalistes
  • dessiner des voitures
  • dessiner des scènes de pluie
  • dessiner un torrent

On voit que si certaines ambitions sont générales, d’autres sont plus précises. Dès le départ, je sais quelles scènes vont me poser problème. Continuer la lecture de « Jotunheimen – Post-mortem (2) »

Jotunheimen – Post-mortem (1)

Après 3 ans de travail, Jotunheimen se termine. C’est une page de ma « carrière » qui se tourne. En effet, mes prochains projets n’intègreront pas de lapin comme personnage principal… Il est essentiel alors de regarder en arrière et de critiquer son propre travail afin d’éviter de répéter les mêmes erreurs. Petit bilan sur Jotunheimen. Première partie : le scénario.

L’écriture

Entre l’idée de départ de Jotunheimen et la finalisation de son scénario, il s’est passé 4 mois. Je ne l’ai jamais caché, ce projet résulte d’un voyage personnel en Norvège où j’ai accumulé des anecdotes, des ressentis et des rencontres qui ont stimulé l’écriture d’une histoire.

Les premiers dessins de Laura ont été réalisées en Norvège. Elle était alors une renarde.

Mes précédents scénarios avaient été écrits de la manière suivante :

  • Le Modèle Vivant : écriture scène par scène (mais histoire complète en tête)
  • Salle des Profs : écriture chapitre par chapitre
  • L’Éveil des Sens : écriture complète du scénario

Avec Jotunheimen, j’effectue un retour en arrière. L’enchaînement des scènes et complet mais le détail des scènes, non. En gros, les 3/4 du scénario étaient écrites lorsque j’ai commencé. J’avais commencé une remise au propre du scénario, mais j’ai tenu 4 pages… Continuer la lecture de « Jotunheimen – Post-mortem (1) »

Recomposer la planche

Ma dernière planche a eu droit à un traitement particulier de recomposition des cases. Petite étude de cas avec la page 55 sur comment équilibrer sa planche.

La planche 55 montre Laura au sol, blessée, et Alexis s’occupant d’elle. Elle manque forcément de mouvement et il fallait varier les plans pour animer l’ensemble. Voilà à quoi ressemblait la première version :

Continuer la lecture de « Recomposer la planche »

Bilan 2016

Comme chaque année, il est temps de faire le bilan sur l’année écoulée et faire le point sur les projets à venir en 2017 !

En 2015, j’avais réalisé 28 planches de Jotunheimen. En 2016, j’en réalise 27. J’ai tenu le rythme à ma grande surprise ! Car le mois de septembre aura été un sacré frein à ma productivité : la fin de mon atelier BD et la réforme du collège ne m’ont pas aidé à dessiner. Il a fallu grappiller du temps ! Comme il reste une petite vingtaine de pages à réaliser, 2017 verra la fin de Jotunheimen en noir et blanc en tout cas !

Un nouveau projet à venir ?

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Fury Road Trip

article_analyseDepuis toujours, je dessine des animaux pour mes bande-dessinées. Cette passion, je l’ai déjà expliquée, notamment pour les lapins. Alors que je commençais à entrevoir de nouveaux récits animaliers, le film de Disney, Zootopie, vient de relancer ma passion avec, entre autres, une sérieuse remise en question graphique.

Pour cela, un petit retour en arrière s’impose. En 2013, je travaillais sur un projet, L’Ultime Symphonie. Le fait que mes personnages y soient des animaux avait un véritable sens. Je me lançais alors dans une caractérisation plus poussée de ces derniers, avec de nombreuses recherches plus ou moins réussies. Finalement, le projet sera mis de côté pour une durée indéterminée. Trop ambitieux à l’époque, il l’est toujours aujourd’hui ! On parle d’une saga d’héroïc fantasy avec tout un univers à construire… Continuer la lecture de « Fury Road Trip »

Faire la promotion de son blog

Infographie par Daniel Iverson - Creative Commons
Infographie par Daniel Iverson – Creative Commons

Suite à mon article sur le We Do BD, j’enchaîne sur mon rapport aux réseaux sociaux. Vaste sujet qui se complexifie au fur et à mesure que les années passent. J’en profite d’ailleurs pour annoncer que cela fait désormais 7 ans que j’ai un blog de dessin (qui n’était pas orienté bande-dessinée au départ). Le temps passe vite, vraiment ! Du coup, j’ai le droit de faire le vieux con.

Le blog

comicsbooster2

La promotion d’un blog était auparavant relativement simple : il fallait aller sur les blogs des autres, y mettre des commentaires et espérer que cela créerait un flux, certes faible, mais existant vers notre propre production. Ce système fonctionne toujours de mon point de vue, mais la plupart des blogueurs n’ayant que peu de temps pour lire les blogs des autres (ou ne prenant plus le temps ?), le flux s’est sacrément tari.

Reste la possibilité de participer à plein d’événements annexes : 23 heures de la BD, Inktober, Drink’n’Drak, concours de caricatures, Golden Blog Awards, etc. Ce type d’événements rallient une forte part de la communauté bloguesque et permet de partager son travail sans avoir l’air de s’imposer. Est-ce que c’est, à court et à moyen terme, réellement efficace ? On peut se poser la question.

Mon ancienne newsletter me permet de gagner de nombreux abonnés. Ainsi, 70 personnes reçoivent les notifications d’articles, une centaine pour les articles « de fond ». Hélas, nombreux sont ceux qui pointent du doigt l’inefficacité du système. En effet, les mails de notifications semblent souvent se perdre dans les limbes de l’internet…

Facebook

Aime-moi !J’ai un rapport compliqué à Facebook. Après une première incursion purement bloguesque sur le site, je m’étais aperçu que le réseau social ne faisait pas vraiment ressortir le meilleur côté des gens. Les trolls y étaient bien plus nombreux et les partages finalement peu existants. Mon blog de critique BD, parallèle à ma production, n’arrangeait pas les choses…

PublicationJe suis donc revenu sur Facebook en séparant nettement mes activités. Mes amis sont vraiment mes amis. J’ai ensuite créé une fan page qui doit promouvoir mon blog. Hélas, celle-ci stagne depuis des mois autour de 170 fans. Impossible de faire augmenter ce nombre. Et comme je suis allergique aux concours du genre « si j’arrive à 200 fans, je dessine une fille nue », je ne vois pas comment augmenter mon nombre de « fans ».

Pourtant, ma dernière illustration m’a montrée comment arriver à toucher plus de monde… Passons sur le fait que vous êtes tous des obsédés, donc…

Ma page Facebook

Twitter

Suis-moi !Twitter est loin d’être ma tasse de thé. Très peu présent sur ce réseau social, je ne fais avant tout qu’y partager mes articles de Blogbrother et Tout à l’Ego. J’essaie (en vain ?) de mettre de temps en temps quelques hashtags pertinents, mais cela ne semble pas beaucoup marcher. Heureusement que Le Pueblo me soutient dans ma démarche en répondant et retwittant certains de mes tweets…

Curieusement, j’ai plus de followers malgré ma piètre activité. Un peu plus de 200. Et ça augmente régulièrement (mais très lentement). Il est peu étonnant que mon compte n’explose pas sur twitter puisque que je ne retweete presque rien, ne commente rien et ne partage presque rien… Il va falloir être plus actif !

Mon compte Twitter

Tumblr

logo_tumblrJ’ai ouvert récemment un Tumblr. Le but était de présenter mes croquis, mes crayonnées, mes recherches… Bref, des productions inachevées. Contrairement au blog où je publie uniquement celles qui méritent une analyse, l’idée est sur Tumblr de montrer des productions en cours.

Comme j’avais déjà un Tumblr (Les Maux du Collège), j’ai cru bon de les lier. Grosse erreur, puisque les personnes que je suis sur Tumblr tombent sur mon blog de citations et pas de dessin. J’ai donc supprimé mon blog pour le réouvrir avec une autre adresse mail… Ça ne va pas m’aider à gérer tout ça, mais la lisibilité intra-Tumblr sera plus forte.

J’aime beaucoup cette idée de blog façon « envers du décor ». Ça se fait beaucoup chez les illustrateurs et auteurs de BD et je pense que cela peut m’apporter un autre public. Reste à en assurer la promotion correctement, ce qui est loin d’être gagné… Pour vous pousser à y jeter un oeil, sachez que j’y ai mis une case de la prochaine planche (crayon + encrage)…

Mon Tumblr

Évidemment, d’autres possibilités existent. Je me multiplie déjà sur d’autres sites communataires (BDAmateur, Webcomics, Amilova) et je sais que d’autres me tendent les bras (Café Salé, DeviantART). J’ai peur de multiplier les endroits où je poste des productions et que mes lecteurs voient, chacun à leur manière, des choses différentes. Et dans ce cas-là, quel intérêt ? Mon blog reste le point d’encrage de l’ensemble et le suivre permet de ne rien rater. Ou presque.

Vous aurez tous remarqué le titre racoleur de cet article…

Un peu de symétrie

Larticle_analyse‘intérêt de travailler sur une bande-dessinée à la mise en page « classique » est de pouvoir la modeler. La mise en scène se révèle alors plus ambitieuse et permet des expérimentations plus intéressantes que le simple alignement de cases ou le gaufrier.

Retour sur la dernière planche publiée de Jotunheimen (la seizième donc). Cette page est destinée à montrer le personnage effectuer une correspondance en car au milieu de nulle part. Voilà le magnifique scénario correspondant tel qu’il est griffonné dans mon classeur. Si vous voulez éviter les spoils, ne lisez pas tout en bas (même si ça ne raconte pas grand chose).

Symetrie_07

Le cheminement est donc le suivant :

  1. Alexis est dans le car n°1
  2. Alexis descend du car n°1
  3. Alexis attend le car n°2
  4. Alexis monte dans le car n°2
  5. Alexis est dans le car n°2

On remarque à la simple lecture du cheminement qu’il y a une symétrie centrale dans cette page. Le point 3 est le point de symétrie de la scène. J’ai ainsi eu l’idée de créer un point de symétrie également dans la planche. Et cela, dès le début. Car votre esprit aiguisé a tout de suite remarqué, dans le scénario, le détail suivant :

Symetrie_06

Même si cela ne change pas grand chose dans la lecture, il me semble que ce genre d’effet crée, inconsciemment, un renforcement de la narration.

De la bande-dessinée en palindrome.

C’est en lisant l’ouvrage « Lire la bande dessinée » de Benoît Peeters que je découvre cette construction, dite en palindrome, des planches ou des albums. Pour rappel :

Palindrome : figure de style désignant un texte ou un mot dont l’ordre des lettres reste le même qu’on le lise de gauche à droite ou de droite à gauche.

Deux récits sont alors cités, qui vont me marquer. Le premier, assez incroyable, est « The Upside-Downs of Little Lady Lovekins and Old Man Muffaro » de Gustave Verbeek (même le titre de l’oeuvre semble être à double-sens…). L’auteur propose 64 planches de 6 cases qui peuvent être lues à l’endroit ou… à l’envers ! La prouesse de narration et graphique est incroyable !

Verbeek

Dans la même lignée, les frères Luc et François Schuiten proposent, pour le troisième tome de leur série « Terres creuses » un ouvrage ou il existe un basculement en milieu d’album. Les planches deviennent alors symétriques aux précédentes. Après 36 planches, on passe à la planche 36′, puis 35′, etc. Le titre, « Nogegon » est d’ailleurs un palindrome.

nogegon

Plus modestement, je me suis appliqué à l’appliquer sur une planche où cela me paraissait pertinent. Alexis devient donc le point central et de symétrie de la planche. C’est ainsi que j’aboutis à un storyboard qui reprend cette idée.

Symetrie_08

Je vous laisse apprécier les différences avec la planche finale, souvent mineures mais essentielles :

  • Case 2 : la vue de loin permet de montrer qu’on est dans un coin perdu
  • Case 3 : la vue de face crée un face-à-face entre Alexis et les autres passages. Cela renforcement son isolement, mais aussi sa différente façon de voyager.
  • Case 5 :  simple changement de côté pour éviter la redondance avec la case 6 (particulièrement visible sur le storyboard !).

Le résultat est le suivant, avec le point de symétrie central :

Symetrie_01

Le comparatif case à case rend la symétrie encore plus évidente. Le premier parallèle montre Alexis assis dans le car. Ce sont les « avant » et « après ».

Symetrie_02

Le deuxième parallèle montre le dialogue Alexis-chauffeur. Alexis est dans le questionnement, une pointe de stress. Le chauffeur est, lui, évidemment, dans la décontraction, créant un décalage et renforçant l’image d’un personnage un peu angoissé sur les bords.

Symetrie_03

Le troisième parallèle montre des cases sans dialogues, où le contraste entre le car et Alexis est mis en avant. Le héros apparaît en grisé, se situant dans un plan clairement différent que le car. Cela renforce l’isolement, Alexis ne se sentant plus en sécurité une fois hors du car, le véhicule étant vu comme un forme de cocon protecteur.

Symetrie_04

La case centrale, qui sert de point de symétrie, sort du cadre pour imposer sa présence. Elle sert également d’axe de symétrie : la partie haute et basse se répondent de façon évidente (le haut pour le premier car, le bas pour le deuxième).Symetrie_05

L’usage d’une case longue et peu haute permet d’intensifier l’impression d’isolement du personnage.

Cette planche a été conçue d’une manière particulière. Plus originale que la plupart des planches, il est bon d’intégrer ce genre de réflexion à la création, afin de pousser un peu plus loin son projet. Pour cela, rien de mieux que de lire et relire de grandes bande-dessinées et des ouvrages d’analyse de ces mêmes ouvrages. Ça stimule l’imagination et pousse à être plus ambitieux pour ses projets, fussent-ils confidentiels.

 

Quelques sources sur les projets cités :

Lire la bande-dessinée de Benoît Peeters
Un livre passionnant à lire absolument ! Cela regroupe les analyses des planches et ouvrages les plus novateurs de la bande-dessinée. Très stimulant pour les auteurs.

Critique de Nogegon de Luc et François Schuiten chez kUlturOpat.

Mais où sont passés les trolls ?

makingofCes derniers mois, j’ai fini par accepter l’idée de revenir sur des planches pour faire progresser mon travail. Redessiner une case ou une planche est devenu une façon d’atteindre mes objectifs et de ne pas considérer une travail fini comme définitif. Retoucher et refaire, mais quoi exactement ?

Lorsque je dessine la planche 15 en novembre 2014, le test est crucial. Je suis alors en finalisation du scénario de Jotunheimen, mais je sais que le dessin de ce projet va ma poser des problèmes puisque la nature y est omniprésente. Les décors sont un personnage en eux-mêmes. Je m’attelle donc à la réalisation d’une planche test constituée uniquement de paysages norvégiens. Le résultat me convenant, je décide de me lancer dans l’aventure un mois plus tard, après avoir réalisé une planche test côté personnages.

Quatorze planches plus tard, j’aurais simplement pu passer à la seizième, considérant la quinzième comme terminée. Mais un souci majeur de lisibilité persiste, il me fallait le corriger. En effet, pour la deuxième case, le récitatif installé en bas ne convient pas et fausse le sens de lecture. Même si en soit, ce n’est pas grave puisque les textes sont une énumération de lieux, cela crée une forme de blocage lors de la lecture.

Voilà d’ailleurs ce que nous disait Dubatov :

« Juste je ferais une petite remarque sur la lisibilité du lettrage (…). Pour la lecture de la planche, le texte devrait peut-être suivre la lecture des images pour plus de fluidité dans la narration… La case 3 fait « remonter » l’œil dans la lecture de la page par exemple. Ce n’est pas trop gênant ici vu le côté descriptif du texte, façon carte postale. »

page15_lecture

Il fallait donc « simplement » remonter le récitatif. Mais vue la place du bus, je devais aussi décaler la case vers le bas. Bref, cela demandait à être redessiné. Heureusement que la table lumineuse permet de reprendre le dessin de base sans problème.

page15_lecture2

À l’origine, une correction de la case 2 suffit. Mais tant qu’à faire, je décide de tout refaire. Avec une table lumineuse, le travail n’est pas si long que ça. Ainsi, en une vingtaine de minutes, tout le crayonné est refait. Cela me permit d’ajuster d’autres petits détails, comme l’encrage ou les textes.

Densifier l’encrage

Au fur et à mesure de la production de Jotunheimen, j’ai mis de côté les grands aplats de noir pour privilégier les hachures. Cela donne plus de volume et de matière. Cela est particulièrement flagrant pour mes personnages vu de dos en avant-plan :

page15_encrage

Je ne cache pas que cette idée d’un encrage plus en matière et plus fourni est lié à l’idée de me passer de couleurs pour la suite… Rien n’est décidé, mais je veux produire des planches lisibles même dépourvues de couleur.

Cet encrage plus en matière est visible avant tout pour la dernière case où l’arbre en avant plan est désormais moins plat. En revanche, l’encrage de la végétation est peut-être moins réussi.

page15_encrage2

Au delà des hachures, j’ai aussi pris en compte les remarques de lisibilité liées à l’encrage trop plat. Ainsi, Boutanox disait :

« En comparant le crayonné et la version encrée, tu sembles perdre de la profondeur… C’est un problème récurrent (…) : l’encrage a souvent tendance à « aplatir » le dessin. Peut-être que tu gagnerais à utiliser plusieurs feutres d’épaisseurs différentes, en gardant les traits épais pour le premier plan, et les traits plus fins, plus estompés, pour l’arrière-plan… »

Depuis, j’utilise plusieurs épaisseurs de plumes pour ce projet, il me fallait donc aussi le faire pour cette planche. C’est le cas pour tous les avant-plans (végétation en case 1 et 4), le point de la case 2).

page15_encrage4

Nouvelle technique sur Jotunheimen : les avant-plans sont encrés avec une plume plus épaisse, donnant plus de profondeur à l’encrage. Sur cette case, trois niveau de traits : les frères en gros, la mère en moyen et l’armoire avec un trait encore plus fin.

Concernant la case 2, j’en ai profité pour densifier l’encrage du coin haut-gauche (rochers mieux définis, cascade plus marquée…) et j’ai ajouté la texture des pierres du pont. En ajoutant des détails, j’insiste d’autant plus sur le fait que cet élément est proche du lecteur et cela donne de la profondeur. De plus, le pont était en soit un peu vide alors. Enfin, pour des questions de clarté, la rambarde n’est plus toute noire. Seule la partie « derrière » l’est afin de donne un peu de volume au pont en lui-même.

On peut remarquer également le rocher en bas à gauche avec un contour plus épais.

page15_case_2

Des récitatifs à adapter

J’ai profité de l’occasion pour changer également la place et la forme des récitatifs pour mieux les intégrer à l’ensemble. Ainsi Andalsnes devient Le village d’Andalsnes.

La dernière case ne me convenait pas, j’en ai profité pour décaler un peu les deux récitatifs vers les coins de la case.

page15_texte

Cette démarche de reprendre des planches déjà dessinées est de plus en plus intégrée dans mon travail. Ainsi, je prévois déjà de reprendre la case 2 de la page 1 et la case 3 de la page 13 que je trouve beaucoup trop plates. Pour un projet qui devrait me prendre près de 3 ans, je peux bien passer quelques heures à modifier des détails, non ?

Un peu de couleur dans ta vie

article_analyseSi vous suivez mon blog régulièrement, vous savez combien la couleur (numérique) me gonfle. Mais en même temps, dans le passé, dessiner des décors, tracer des perspectives ou des bords de cases me gonflaient aussi. Alors tant qu’à être obligé de le faire, autant essayer de le faire bien. Hélas, je n’ai aucun talent particulier pour « sentir » la couleur et poser des ambiances puissantes. Bref, comme dirait mon prof de dessin, je fais du coloriage. Triste constat.

La solution existe mais pose d’autres problèmes : la couleur directe. Je prend beaucoup de plaisir à manier le pinceau (rien de sexuel ici), mais ce n’est pas adapté à Jotunheimen. Rappelons l’un des rares tests effectués pour ce projet :

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Problème : c’est certainement ce que j’ai fait de mieux en couleur pour le projet… Voilà qui est gênant puisque je ne veux rien faire en couleur directe, mais vu la souffrance que ça m’a valu pour Salle des Profs. Car scanner l’aquarelle, c’est un peu comme essayer de dormir en boîte de nuit. C’est possible, mais mieux vaut être bourré.

J’ai ainsi décidé de passer mon été à essayer de coloriser correctement mes planches. Cela revient à faire des essais, mais aussi des choix. Pour le moment, j’ai colorisé deux planches et ce n’est pas en soit un grand succès. Dans les faits, ça donne du volume au dessin et une meilleure visibilité et le plus est indéniable. Mais côté ambiance, c’est zéro pointé.

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Franchement, c’est pas top, mais ça rend la planche beaucoup plus lisible.

Le souci, c’est que pendant longtemps la bande-dessinée a souffert de cet aspect de coloriage. Depuis quelques années, l’amélioration des techniques d’impression ont permis aux auteurs de se lâcher et de réaliser des couleurs qui donnaient un plus indéniable à leurs ouvrages. Quelques exemples pour la route. Mes références sont essentiellement les aquarellistes parce que j’adore ça. Et forcément, c’est super beau.

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Extrait du troisième tome du Vent Dans les Saules par Michel Plessix.

Alors là, c’est sûr, niveau ambiance, c’est posé. Il fait nuit en bord de rivière, tout est légèrement bleuté. C’est juste magnifique. On est loin d’un coloriage ! L’histoire en question est d’une poésie sans nom. La couleur y est pour beaucoup.

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Extrait du quatrième tome de Blacksad par Guarnico et Diaz Canales

Même s’il est un peu facile de dire « j’aimerais tant faire des choses aussi belle que Guarnido » (quand on fait de l’animalier, c’est un peu LA référence ultime), on peut voir ici son talent pour la couleur en tant que telle et les ambiances qui en découle. La palette de couleurs chaudes retranscrivent bien la chaleur et la lourdeur de la Nouvelle Orléans. Ça n’empêche pas quelques touches de gris/bleu (pour le jean) ou de vert (qui tire quand même sur le jaune).

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Extrait de Route 78 par Eric Cartier

Moins virtuose dans le dessin et la couleur, « Route 78 » m’a fortement marqué graphiquement. La palette de couleurs restreinte, jouant sur les oppositions, est très réussie et m’a vraiment fait réfléchir sur le sens que je voulais donner à mes propres couleurs pour Jotunheimen. C’est la base de cette réflexion que vous êtes en train de lire. L’auteur ajoute des restes de crayonnés sur sa planche qui donne aussi de la texture à l’ensemble.

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Extrait de Secrets, L’Angélus Tome 1 par Giroud & Homs

Là encore les ambiances sont posées avec peu de couleurs. Le dessin est vraiment sublimé par la colorisation qui lui donne beaucoup de force. L’encrage, très discret, permet aussi d’adoucir l’ensemble. Une grosse claque graphique.

Évidemment, il est facile de se masturber sur des grands dessinateurs en espérant un jour les rejoindre au panthéon. Mais il est aussi anormal de se contenter d’un résultat médiocre. Dans le meilleur des mondes, un formidable coloriste ferait le boulot à ma place, mais lorsque l’on est amateur, ce n’est pas possible.

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Cherchez une âme ici, vous n’y trouverez rien. Malgré quelques efforts d’unification des teintes (les arrière-plans des cases 3 et 4), c’est un coloriage qui me rapproche d’autant plus de la ligne claire que je rejette (et qu’on me lance au visage en permanence).

Pour conclure, citons un gentil lecteur qui m’a dit, spontanément : « Je ne sais plus si je l’ai déjà dit (…), mais ton noir et blanc est très lisible, la mise en couleurs me parait superflue. » Si je n’obtiens pas ce que je veux, il n’est pas impossible que je tire un trait (hi hi) sur la couleur.

Les critiques des BDs citées sur Blog Brother :

Le vent dans les saules, T3

Blacksad, T4

Route 78

L’Angélus, T1