Mais où sont passés les trolls ?

makingofCes derniers mois, j’ai fini par accepter l’idée de revenir sur des planches pour faire progresser mon travail. Redessiner une case ou une planche est devenu une façon d’atteindre mes objectifs et de ne pas considérer une travail fini comme définitif. Retoucher et refaire, mais quoi exactement ?

Lorsque je dessine la planche 15 en novembre 2014, le test est crucial. Je suis alors en finalisation du scénario de Jotunheimen, mais je sais que le dessin de ce projet va ma poser des problèmes puisque la nature y est omniprésente. Les décors sont un personnage en eux-mêmes. Je m’attelle donc à la réalisation d’une planche test constituée uniquement de paysages norvégiens. Le résultat me convenant, je décide de me lancer dans l’aventure un mois plus tard, après avoir réalisé une planche test côté personnages.

Quatorze planches plus tard, j’aurais simplement pu passer à la seizième, considérant la quinzième comme terminée. Mais un souci majeur de lisibilité persiste, il me fallait le corriger. En effet, pour la deuxième case, le récitatif installé en bas ne convient pas et fausse le sens de lecture. Même si en soit, ce n’est pas grave puisque les textes sont une énumération de lieux, cela crée une forme de blocage lors de la lecture.

Voilà d’ailleurs ce que nous disait Dubatov :

« Juste je ferais une petite remarque sur la lisibilité du lettrage (…). Pour la lecture de la planche, le texte devrait peut-être suivre la lecture des images pour plus de fluidité dans la narration… La case 3 fait « remonter » l’œil dans la lecture de la page par exemple. Ce n’est pas trop gênant ici vu le côté descriptif du texte, façon carte postale. »

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Il fallait donc “simplement” remonter le récitatif. Mais vue la place du bus, je devais aussi décaler la case vers le bas. Bref, cela demandait à être redessiné. Heureusement que la table lumineuse permet de reprendre le dessin de base sans problème.

page15_lecture2

À l’origine, une correction de la case 2 suffit. Mais tant qu’à faire, je décide de tout refaire. Avec une table lumineuse, le travail n’est pas si long que ça. Ainsi, en une vingtaine de minutes, tout le crayonné est refait. Cela me permit d’ajuster d’autres petits détails, comme l’encrage ou les textes.

Densifier l’encrage

Au fur et à mesure de la production de Jotunheimen, j’ai mis de côté les grands aplats de noir pour privilégier les hachures. Cela donne plus de volume et de matière. Cela est particulièrement flagrant pour mes personnages vu de dos en avant-plan :

page15_encrage

Je ne cache pas que cette idée d’un encrage plus en matière et plus fourni est lié à l’idée de me passer de couleurs pour la suite… Rien n’est décidé, mais je veux produire des planches lisibles même dépourvues de couleur.

Cet encrage plus en matière est visible avant tout pour la dernière case où l’arbre en avant plan est désormais moins plat. En revanche, l’encrage de la végétation est peut-être moins réussi.

page15_encrage2

Au delà des hachures, j’ai aussi pris en compte les remarques de lisibilité liées à l’encrage trop plat. Ainsi, Boutanox disait :

« En comparant le crayonné et la version encrée, tu sembles perdre de la profondeur… C’est un problème récurrent (…) : l’encrage a souvent tendance à « aplatir » le dessin. Peut-être que tu gagnerais à utiliser plusieurs feutres d’épaisseurs différentes, en gardant les traits épais pour le premier plan, et les traits plus fins, plus estompés, pour l’arrière-plan… »

Depuis, j’utilise plusieurs épaisseurs de plumes pour ce projet, il me fallait donc aussi le faire pour cette planche. C’est le cas pour tous les avant-plans (végétation en case 1 et 4), le point de la case 2).

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Nouvelle technique sur Jotunheimen : les avant-plans sont encrés avec une plume plus épaisse, donnant plus de profondeur à l’encrage. Sur cette case, trois niveau de traits : les frères en gros, la mère en moyen et l’armoire avec un trait encore plus fin.

Concernant la case 2, j’en ai profité pour densifier l’encrage du coin haut-gauche (rochers mieux définis, cascade plus marquée…) et j’ai ajouté la texture des pierres du pont. En ajoutant des détails, j’insiste d’autant plus sur le fait que cet élément est proche du lecteur et cela donne de la profondeur. De plus, le pont était en soit un peu vide alors. Enfin, pour des questions de clarté, la rambarde n’est plus toute noire. Seule la partie “derrière” l’est afin de donne un peu de volume au pont en lui-même.

On peut remarquer également le rocher en bas à gauche avec un contour plus épais.

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Des récitatifs à adapter

J’ai profité de l’occasion pour changer également la place et la forme des récitatifs pour mieux les intégrer à l’ensemble. Ainsi Andalsnes devient Le village d’Andalsnes.

La dernière case ne me convenait pas, j’en ai profité pour décaler un peu les deux récitatifs vers les coins de la case.

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Cette démarche de reprendre des planches déjà dessinées est de plus en plus intégrée dans mon travail. Ainsi, je prévois déjà de reprendre la case 2 de la page 1 et la case 3 de la page 13 que je trouve beaucoup trop plates. Pour un projet qui devrait me prendre près de 3 ans, je peux bien passer quelques heures à modifier des détails, non ?

Un peu de couleur dans ta vie

article_analyseSi vous suivez mon blog régulièrement, vous savez combien la couleur (numérique) me gonfle. Mais en même temps, dans le passé, dessiner des décors, tracer des perspectives ou des bords de cases me gonflaient aussi. Alors tant qu’à être obligé de le faire, autant essayer de le faire bien. Hélas, je n’ai aucun talent particulier pour “sentir” la couleur et poser des ambiances puissantes. Bref, comme dirait mon prof de dessin, je fais du coloriage. Triste constat.

La solution existe mais pose d’autres problèmes : la couleur directe. Je prend beaucoup de plaisir à manier le pinceau (rien de sexuel ici), mais ce n’est pas adapté à Jotunheimen. Rappelons l’un des rares tests effectués pour ce projet :

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Problème : c’est certainement ce que j’ai fait de mieux en couleur pour le projet… Voilà qui est gênant puisque je ne veux rien faire en couleur directe, mais vu la souffrance que ça m’a valu pour Salle des Profs. Car scanner l’aquarelle, c’est un peu comme essayer de dormir en boîte de nuit. C’est possible, mais mieux vaut être bourré.

J’ai ainsi décidé de passer mon été à essayer de coloriser correctement mes planches. Cela revient à faire des essais, mais aussi des choix. Pour le moment, j’ai colorisé deux planches et ce n’est pas en soit un grand succès. Dans les faits, ça donne du volume au dessin et une meilleure visibilité et le plus est indéniable. Mais côté ambiance, c’est zéro pointé.

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Franchement, c’est pas top, mais ça rend la planche beaucoup plus lisible.

Le souci, c’est que pendant longtemps la bande-dessinée a souffert de cet aspect de coloriage. Depuis quelques années, l’amélioration des techniques d’impression ont permis aux auteurs de se lâcher et de réaliser des couleurs qui donnaient un plus indéniable à leurs ouvrages. Quelques exemples pour la route. Mes références sont essentiellement les aquarellistes parce que j’adore ça. Et forcément, c’est super beau.

VentDansLesSaules3

Extrait du troisième tome du Vent Dans les Saules par Michel Plessix.

Alors là, c’est sûr, niveau ambiance, c’est posé. Il fait nuit en bord de rivière, tout est légèrement bleuté. C’est juste magnifique. On est loin d’un coloriage ! L’histoire en question est d’une poésie sans nom. La couleur y est pour beaucoup.

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Extrait du quatrième tome de Blacksad par Guarnico et Diaz Canales

Même s’il est un peu facile de dire “j’aimerais tant faire des choses aussi belle que Guarnido” (quand on fait de l’animalier, c’est un peu LA référence ultime), on peut voir ici son talent pour la couleur en tant que telle et les ambiances qui en découle. La palette de couleurs chaudes retranscrivent bien la chaleur et la lourdeur de la Nouvelle Orléans. Ça n’empêche pas quelques touches de gris/bleu (pour le jean) ou de vert (qui tire quand même sur le jaune).

Route78

Extrait de Route 78 par Eric Cartier

Moins virtuose dans le dessin et la couleur, « Route 78 » m’a fortement marqué graphiquement. La palette de couleurs restreinte, jouant sur les oppositions, est très réussie et m’a vraiment fait réfléchir sur le sens que je voulais donner à mes propres couleurs pour Jotunheimen. C’est la base de cette réflexion que vous êtes en train de lire. L’auteur ajoute des restes de crayonnés sur sa planche qui donne aussi de la texture à l’ensemble.

L'angelusPlanche

Extrait de Secrets, L’Angélus Tome 1 par Giroud & Homs

Là encore les ambiances sont posées avec peu de couleurs. Le dessin est vraiment sublimé par la colorisation qui lui donne beaucoup de force. L’encrage, très discret, permet aussi d’adoucir l’ensemble. Une grosse claque graphique.

Évidemment, il est facile de se masturber sur des grands dessinateurs en espérant un jour les rejoindre au panthéon. Mais il est aussi anormal de se contenter d’un résultat médiocre. Dans le meilleur des mondes, un formidable coloriste ferait le boulot à ma place, mais lorsque l’on est amateur, ce n’est pas possible.

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Cherchez une âme ici, vous n’y trouverez rien. Malgré quelques efforts d’unification des teintes (les arrière-plans des cases 3 et 4), c’est un coloriage qui me rapproche d’autant plus de la ligne claire que je rejette (et qu’on me lance au visage en permanence).

Pour conclure, citons un gentil lecteur qui m’a dit, spontanément : “Je ne sais plus si je l’ai déjà dit (…), mais ton noir et blanc est très lisible, la mise en couleurs me parait superflue.” Si je n’obtiens pas ce que je veux, il n’est pas impossible que je tire un trait (hi hi) sur la couleur.

Les critiques des BDs citées sur Blog Brother :

Le vent dans les saules, T3

Blacksad, T4

Route 78

L’Angélus, T1

Un titre en vue

article_analyseRégulièrement, quelqu’un me fait une remarque sur mon titre (imprononçable soi-disant) de « Jotunheimen . Avec le festival de BD de Puteaux (qui se tient actuellement), c’était l’occasion de discuter avec des copains bédéastes du choix des titres d’ouvrages. Comment bien choisir son titre ? Doit-on ajouter un sous-titre ? Comment faire en sorte que le titre soit percutant et pertinent sans trop révéler le contenu du livre ?

Le plus simple, avant de parler de « Jotunheimen » est de reprendre tous les titres que j’ai pu trouver par le passé et d’essayer d’y déceler une évolution et voir si j’ai été plus pertinent dans le passé… J’ai toujours trouvé mes titres immédiatement après la conception des prémisses de l’univers et/ou de l’histoire. Et j’ai suivi mes intuitions à chaque fois, sans changer un seul mot. Au risque de m’être trompé ?

Steven & Norbert

Série de strips faisant intervenir les personnages du même nom, le titre est donc pertinent. C’est l’histoire d’un petit-fils qui rend visite à son grand-père. Le titre montre donc bien l’opposition des générations par un prénom “jeune” et américain et un prénom quelque peu passé de mode.

BlongO

Série de strips faisant intervenir un hippopotame. C’est le nom du personnage. Je ne suis pas allé chercher bien loin !

tout à l’ego

Bande-dessinée autobiographique, le titre le montre bien avec le terme “ego”. En plus, ça fait un jeu de mot. Du coup, c’est devenu le nom du blog.

Le septième ciel

Plus obscur ici… Le septième ciel est le nom du bar où se retrouve les divinités, messies et autres personnalités religieuses. Le tout est blasphématoire avant tout. Du coup, le titre est pertinent puisque l’allusion sexuelle est assez évidente.

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le huitième péché capital

Décidément, j’aime les nombre… Ici, on rentre dans le vif du sujet car l’histoire raconte l’instauration d’un huitième péché capital. Le titre laisse en plus la surprise sur la nature de ce nouveau péché.

L’éveil des sens

Un petit garçon découvre les relations garçons/filles  et les premiers émois. J’aime beaucoup ce titre qui décrit plutôt bien l’ouvrage.

Le modèle vivant

Ici aussi j’aime beaucoup le titre, même si son interprétation est souvent faussée. Je joue de l’ambiguïté du mot “modèle”. Dans le livre, le “modèle” est le personnage principal qui s’inspire de sa vie pour écrire une bande-dessinée. Mais intervient également un femme au cours de modèle vivant… Bref, la plupart des lecteurs pensent que le sujet est la modèle avant tout. La couverture par contre est explicite sur le sujet du livre.

La chasseuse d’hommes

Encore un titre avec un double sens. Le seul défaut : il dévoile une partie de l’intrigue.

Histoire de teaser un peu, en ce moment j’ai bien envie de me remettre au projet. Mais bon, c’est pour dans deux ans.

Salle des profs

Un titre hélas déjà pris par le défunt Charb, mais il est parfaitement explicite. Ici on parle des profs entre eux et pas en classe !

Ce titre pose donc des problèmes à mes lecteurs qui s’en plaignent pour deux raisons:

  • Ils ne savent pas le prononcer
  • Ils n’arrivent pas à le retenir

titre_SDPassons donc d’avoir à la prononciation ! L’erreur la plus classique est de prononcer le “jo” en “ro”, façon espagnole. Mais le Norvégien est une langue dérivée de l’Allemand et le “jo” doit donc se prononce “yo” (comme pour le mot allemand “Ja”).

Considérez que vous avez de la chance que le titre ne contienne pas les termes spécifiques de cette langue : Ø, Æ, Å… J’étais un peu déçu d’ailleurs. Ça aurait été encore plus drôle à écrire !

Concernant le titre en soit, le parc du Jotunheimen est au centre de l’intrigue, puisque c’est là que s’effectue la randonnée du personnage. Et, en soit, le parc est un personnage à part entière vu son influence sur le héros (là je tease un peu). Conscient qu’un titre que l’on ne retient pas est mauvais pour le bouche à oreille, j’ai quand même cherché autre chose comme titre, sans trouver réellement quoi que ce soit de pertinent. Franchement, “Jotunheimen” signifie en norvégien “pays des géants”. C’est un peu pourri comme titre et ça fait histoire fantastique pour les enfants.

J’ai donc regardé un peu les titres de ma bibliothèque qui parlait de voyage pour voir ce que ça donnait. Outre le très beau « Route 78 » qui mixe le nom d’une route bien connue avec l’année du voyage, on retrouve des trucs assez bateau. Et après tout, Guy Delisle a bien nommé l’un de ses livres « Pyongyang » ou « Shenzen ». Détail amusant : en changeant d’éditeur, c’est devenu « Chroniques birmanes » et « Chroniques de Jérusalem ».

Rien n’est définitif tant que livre ne sera pas imprimé. « Jotunheimen » pourrait changer de nom, mais je n’en vois pas l’intérêt actuellement. Les ventes de mes livres restent cantonnées en très grande partie à des connaissances et à des lecteurs très réguliers du blog. Alors le titre du livre ne me paraît pas avoir une importance capitale !

 

Je suis complètement décalqué

makingofAujourd’hui, je vous présente une des astuces qui m’a été soufflée par mon prof pour faire la case 5 de la planche 11. Cette case a été maintes fois repensée avant d’arriver à sa version finale.

Dans la planche, plusieurs étapes se succèdent assez rapidement, mais logiquement : le personnage arrive à l’aéroport, récupère ses bagages, sort de l’aéroport, prend le bus puis arrive à son hôtel. Voilà le scénario (sommaire) écrit pour cette planche :

case_scénario

Et le storyboard correspondant, d’une taille ridicule (agrandi ici pour l’occasion !)

case_storyboard

Avec cette base (conçue il y a plusieurs mois lors de l’écriture du scénario), je retravaille un storyboard plus abouti sur un format A4. J’écris cette fois les textes, afin de pouvoir les placer et de voir s’ils ne sont pas trop longs.

case_storyboard2

A ce moment là, il y a une case de plus dans la narration qui permet de mettre une pause en plein centre. La case qui nous intéresse (où le personnage demande “Trondheim train station ?” à l’entrée d’un bus) est à peine plus détaillée que sur le précédent storyboard. Le problème ici est que j’ai storyboardé un peu à l’arrache sur une feuille A4, certes, mais dans un format presque carré. Du coup, une fois tracé sur la planche, les cases du milieu ne sont pas carrées mais verticales. Et pour les trois cases, ça ne va pas. Je recompose donc le tout avec les deux première au format paysage et la case 5 au format carré. Tout cela convient bien mieux, il est temps de réaliser le tout.

La vue pensée pour la case 5 est assez complexe dans le sens où l’on voit le personnage en train de monter (ou de se pencher) à l’intérieur du bus. Après quelques recherches du genre “intérieur bus” ou “porte bus”, je finis par trouver une image référence qui correspond à ce que je cherche :

case_reference

Je pose donc mes trois points de fuite et réalise le décor. En soit, pas de difficulté particulière. Une fois les points de fuite posé, il suffit d’y aller tranquillement. C’est l’avantage de la perspective, on ne peut pas vraiment se tromper.

case_décor

L’idée est de poser le décor pour ensuite ajouter le personnage à l’intérieur. C’est beaucoup plus simple que d’adapter un décor à un personnage, surtout qu’ici la position n’est pas forcément évidente. Mon prof me propose alors de dessiner le personnage sur un calque, afin de ne pas avoir à gommer mon décor lors de la réalisation. En bon élève, je m’exécute :

case_personnage

On peut remarquer les petites marques sur les côtés qui délimitent la case. Elles permettent de bien recaler le calque quand on l’a enlevé. Le calque est scotché à la planche pendant la réalisation.

Superposés, voilà ce que ça donne :

case_crayon

A ce moment-là, je m’aperçois que ça ne va pas. Le personnage est trop bas. Soit le bus est très haut sur roue, soit le pied est sous le bus… Bref, ça ne va pas. Comme on est sur calque, on ne s’embête pas, on relève simplement le calque.

case_crayon2

Il ne reste plus qu’à recopier le personnage à la table lumineuse. Pour cela, je l’encre rapidement au feutre pour mieux voir les traits. C’est fait très rapidement, les ajustements de posture et de tracés se font directement sur la planche.

case_personnage2

Ensuite, on encre :

case_fin

Voilà pour le détail de création de cette planche assez différente de ce que je fais habituellement. Même si cela semble long et fastidieux, cela ne m’a pas pris forcément beaucoup de temps. Du coup, j’ai réutilisé cette façon de faire dès la première case de la planche suivante. Je prends énormément de plaisir à utiliser ces techniques traditionnelles qui ne sont pas sans rappeler la façon de travailler aujourd’hui sur Photoshop !

Baisse de prix sur les livres

The Book Edition a baissé tous ses prix depuis quelques jours. Vous pouvez donc retrouver tous mes livres à prix modeste ! Une excellente nouvelle, qui me réjouit aussi pour mon prochain projet, « Jotunheimen », qui aurait été publié à un prix bien trop élevé sinon.

Voilà la petite collection. À noter que « Le Modèle Vivant » est à moins de 5 euros !

Le livre L\'éveil des sens

Le livre Salle des profs

Le livre Le modèle vivant

Le livre Tout à l\'Ego

Voilou ! Globalement, cette baisse permet de proposer à l’unité, ce que je proposais avant en achetant le tout par lots de 25 ou 50…

Interview de PiTer & Michnik

article_interviewCela faisait longtemps que je n’avais plus fait d’interview. Plus qu’un manque de temps, c’était un manque d’inspiration. je ne trouvais pas de blog ou de webcomics qui me donnait suffisamment d’interrogations pour passer aux questions. Et en tombant sur « MNHN », j’ai compris que j’avais trouvé mon bonheur.

logoMNHN Continuer la lecture de « Interview de PiTer & Michnik »

Un jeu d’enfants

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Chaque année depuis 2011 je participe aux 23 heures de la bande-dessinée. L’occasion de repousser les limites de la bande-dessinée et d’explorer un peu des contrées inconnues. Les conditions des l’édition 2015 étaient les suivantes :

  • le thème : Les Naufragés
  • la contrainte était de faire apparaître David Hasselhof avec un T-shirt “I love Piak”.

Si le thème était dans la tradition des 23hBD (c’est-à-dire suffisamment large pour permettre aux dessinateurs de se l’approprier), la contrainte était une private joke de mauvais goût. Je l’ai pour ma part expédiée avec un poster dans la chambre de l’enfant.

Trouver une histoire exploitable rapidement.

Lors de la première heure, j’ai donc cherché une histoire. Ce que je ne voulais pas (et que j’ai vu dans beaucoup d’histoires), c’est un mec sur une île qui ne se rappelle plus pourquoi il est là. Typiquement le genre de scénario où on commence à dessiner sans trop savoir où l’on va. Voilà les idées qui me sont venues :

  • un jeune prof naufragé en collège ZEP (mais ça me paraissait un peu tiré par les cheveux)
  • des provinciaux naufragés à Paris (mais il fallait dessiner Paris et pour les 23h c’était trop galère)
  • des Parisiens naufragés dans la Creuse ou la Picardie (mais tenir une BD entière dessus ça paraissait compliqué)
  • des touristes naufragés chez les naturistes en Ardèche (mais là aussi, quel intérêt ?)

recherches

La première page de recherche.

Ressortir les projets du carton, une nouvelle tradition ?

Je me suis alors rappelé d’un vieux projet de BD jeunesse, Jeux d’enfants. Lors du festival de Puteaux d’il y a trois ans, je développe l’idée d’un petit garçon qui s’imagine une histoire. Celle-ci est toujours perturbée par sa sœur. J’avais écrit la première séquence, sur le monde des cowboys. L’idée était de décliner sur tous les univers classiques de jeu (conquête spatiale, pirates, guerre, etc.). J’avais en tête un diptyque : premier tome pour les jeux de garçons, deuxième tome pour les jeux de fille. Le tout était prévu un numérique (c’était l’époque où on croyait que le numérique permettrait de faire des choses incroyable en BD…) avec des fondus de cases lorsqu’on passait de l’univers fantasmé à l’univers réel.

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Bref, les 23h me donnaient l’occasion de tester le concept en l’adaptant aux pirates.

Afin de bien construire l’ensemble, j’écris quelques premières idées, puis me lance dans le scénario de façon plus construite. J’écris l’histoire du pirate, puis intercale les scènes annexes. Ainsi, le kraken était à l’origine la sœur et non la mère !

Maintenir une qualité graphique sur les 23 heures.

Niveau dessin, j’ai relu ma participation de l’année dernière, Un Cas d’Espèce et j’ai été très déçu du résultat. Trop ambitieux graphiquement, le dessin est inégal et parfois franchement moche. J’ai gardé ça en tête et ai évité de bâcler des cases, même si rien n’est parfait bien évidemment.

Je suis parti sur un papier de bonne qualité : 250 g/m². Cela me donnait un vrai confort. Ce sont de grandes pages en A3 où j’ai dessiné deux pages (en A4 paysage) dessus. Cela m’a aussi permis de dessiner les encadrements de façon plus efficace.

J’ai encré le tout à la plume. C’est très galère, surtout que cela donne inévitablement des bavures quand la fatigue se fait sentir. Mais je suis très à l’aise avec et le feutre donne un résultat sans délié qui me gêne. J’ai utilisé deux plumes de tailles différentes pour faire des avants-plans qui ressortent plus. Les aplats sont faits au feutre pinceau.

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Un exemple de l’utilisation pertinente de la grosse plume : les déliés sont imposants et donnent du volume au Kraken.

Au niveau des références, on notera Calvin & Hobbes de Bill Watterson, notamment dans son utilisation de Spiff le spationaute. Du coup, mon projet m’est apparu pas si original que ça. De quoi le replonger dans mes tiroirs ? Certainement !

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Pour dessiner les pirates et tout ce qui y a trait, je me suis basé sur le dessin de Masbou dans De Cape et de Crocs. Cela m’a servi de référence pour dessiner le bateau de pirate, l’hippopotame pirate, le chapeau du garçon, le kraken, etc. Le temps étant limité, difficile de passer du temps à faire des recherches complexes…

Masquer les limites graphiques.

Afin d’éviter d’avoir une bande-dessinée moche, il faut savoir frapper “fort” graphiquement régulièrement dans l’histoire, avec des grandes cases notamment, et éviter l’effet “plus le temps passe, moins je dessine bien”. Beaucoup utilisent des formats proches du strip pour garder un dessin constant (et peu fatigant). C’est un bon moyen de produire une bande-dessinée de qualité. Comme je ne suis pas doué pour le strip, j’essaie à l’inverse d’innover avec des mises en pages travaillées.

Au niveau du rythme, après avoir atteint le rythme d’une page par heure au tiers de l’épreuve, j’ai accéléré pour atteindre près de deux pages par heure. On va alors plus à l’essentiel.

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Une planche typique de fin d’épreuve : les personnages sont vus de loin et dessinés en raccourcis ! On remarque que je n’ai pas fait l’effort d’y dessiner les filles (en sirènes) afin de gagner du temps. 

Au final, je suis assez content du résultat. Vu l’épreuve, il y a évidemment plein de détails qui me gênent dans le dessin ou le scénario, mais j’ai pris beaucoup de plaisir à dessiner cette histoire. J’espère que vous en aurez eu autant à la lire !

23HBD 2015

AFFICHE_23HBDVous pourrez me suivre ce week-end pour les 23 heures de la BD. C’est ma cinquième participation ! Mes pages seront lisibles ICI. Comme chaque année, je les ajoute dès qu’elles sont terminées. N’hésitez donc pas à regarder régulièrement s’il n’y en a pas de nouvelles. Vous pouvez aussi relire ma participation What About Sex de 2013 où Un Cas d’Espèce, dessinée l’année dernière. Continuer la lecture de « 23HBD 2015 »

Festival de Gretz-Armainvilliers

Affiche_festivalBD

Je serai demain, toute la journée, au Festival de BD de Gretz-Armainvilliers (77) avec le CultureZine. L’invité d’honneur (qui réalise l’affiche) est Boutanox, qui dessine aussi dans le Culture Zine et dans plein d’autres trucs !

Plusieurs catégories de bandes dessinées seront présentées : mangas, histoire, comic’s,etc, avec :
– des animations
– des séances de dédicaces
– des expositions
– un concours de dessin organisé par la SNCF, visant à faire participer les auteurs intéressés. Après un vote du public, le gagnant se verra remettre un prix : voyage en TGV, 1ère classe avec visite du Musée de la BD à Bruxelles
– des tables et des panneaux pour donner libre cours à l’inspiration des visiteurs pour la création de « bulles »

Le train de la BD, le samedi 7 mars, au départ de Magenta, avec présence d’auteurs pour dédicace sur les BD offertes par la SNCF.

Je prends bien le train à Magenta (en fait, c’est le RER E). Je ne sais pas à quelle heure part ce train de la BD, mais je vais me cacher dans un coin pour corriger mes copies…

Refaire une case

makingofRefaire une case est toujours désagréable, surtout quand elle a été encrée et colorisée ! Mais c’est parfois nécessaire. Dans le cas de Jotunheimen, j’avais réalisé la première case de l’album, avant tout pour me rassurer sur ma capacité à dessiner une grande case de décor urbain. Lors de la réalisation de cette première page, la question s’est donc posée : fallait-il refaire cette case ? La réponse : oui !

Tout d’abord, une petite comparaison entre les deux cases. Elles ont été réalisées sur le même format et le même type de papier.

case_01_a

case_01_b

Ce qui marque ici, c’est la finesse de l’encrage pour la deuxième version, notamment sur les fenêtres du ministère. Mais la composition elle-même est différente. Ainsi, la bâtiment prend plus de place, tant horizontalement que verticalement. Il donne bien plus l’impression d’avancer sur la Seine, tout comme le viaduc à droite, moins fuyant.

case_01_superposition

On voit bien avec la superposition des cases cette composition légèrement différente. La case est également plus haute, pour des raisons de mise en page. C’est aussi la différence entre faire une case isolée et l’intégrer réellement dans une planche !

case_01_détails

C’est alors l’occasion de retravailler le bâtiment et d’ajouter des détails. Je souhaitais d’abord corriger le problème des “pieds”, qui avaient une perspective suspecte. En suite, j’ai détaillé différents éléments, donnant un peu plus de volume et de profondeur à l’ensemble. Ce n’était pas énormément de travail, mais, satisfait du premier essai, je savais que j’allais y arriver et j’ai donc pu corriger les endroits trop simplistes.

case_01_viaduc

J’en ai profité pour ajouter le viaduc du métro, qui donne un peu plus d’identité à la page et un détail typique de Paris supplémentaire. Cela intègre mieux le pont qui vient ensuite et le métro correspondant.

case_01_oiseaux

Maintenant que je sais mettre des oiseaux dans les pages, je ne m’en suis pas privé… Trois niveaux de profondeur ici.

case_01_encrage

J’en ai profité pour essayer d’avoir un encrage plus intéressant. Outre la finesse de certains traits, j’ai ajouté une barrière en haut à gauche, j’ai affiné l’ombre à la fin de la passerelle pour mieux définir le volume et ai changé complètement ma façon d’encrer les pieds du bâtiment pour donner plus de volume et plus de noir aussi. Sous le pont, l’ombre sur le quai donne du volume au quai.

case_01_texte

Vu la nouvelle construction de la case, il paraissait plus intéressant d’écrire le texte sur deux lignes plutôt qu’une. Cela permet de mieux utiliser l’espace en haut à droite.

On pourra toujours me dire qu’une refonte complète de la case n’était pas forcément nécessaire. Mais dans un but d’amélioration, il aurait été dommage de ne pas modifier certains points et, malheureusement, cela passe souvent pas le fait de tout refaire. Et ce sont tous ces petits détails modifiés, mis bout à bout, qui, au final, me rendent satisfait de ma case. Ce qui n’était pas le cas avant !

Tracer des droites

makingofLe problème d’apprendre la perspective, c’est que l’on se sent obligé d’utiliser ses règles (au sens propre comme figuré !). Du coup, ça prend beaucoup de temps, mais le résultat est souvent au rendez-vous. Explications sur une case anodine qui a demandé du boulot.

D’abord, il est important de présenter la case en question. Elle doit montrer Alexis regarder quelque chose en rayon dans un magasin de sport. On le voit de trois quart et on ne distingue pas ce qu’il voit. La case est de taille moyenne. Voilà son crayonné final :

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Visiblement rien d’extraordinaire ici, mais la perspective y est essentielle. J’ai d’abord tenté d’y échapper (subtilement) en traçant le rayon de l’arrière plan. Ça faisait juste et je me suis arrêté là au premier abord. J’ai choisi (comme souvent) un point de fuite infini pour les verticales histoire qu’elles soient… verticales !

perspective2b

J’ai pu ensuite déterminer l’horizon et un premier point de fuite en rejoignant les deux lignes. Cela me permettait alors de dessiner le rayon des T-shirts proprement. J’ai souvent du mal à trouver mon horizon, notamment dans les plongées et les contre-plongées. Mais une fois que c’est fait, on sait alors que tout va être simple.

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Après avoir dessiné une première la tente (au milieu bas de la case), je m’aperçois qu’elle est très bancale. Je comprend alors que je dois chercher mon deuxième point de fuite (quelque part à gauche) pour la positionner correctement au sol. C’est là que la différence avec le simple storyboard se faire. Sur un storyboard, on pose le décor au feeling. Ici, il faut être précis.

J’utilise à cet effet la technique de sioux de mon professeur ès bande-dessinée : dessiner le personnage en entier pour trouver le sol. Comme c’est un bas de page, cela m’oblige à coller une feuille supplémentaire pour en faire le prolongement. J’ajoute aussi le bas du rayon (en premier plan), ce qui me donne une droite. Quand elle croise l’horizon, j’ai mon deuxième point de fuite. Cela me permettra de tracer les affichettes correctement et d’ajouter des néons, donnant un peu de texture au plafond.

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Au final, la case est “propre”, elle ne contient pas d’erreur de perspective. Malgré les impressions, les tracés des perspectives ont été plutôt rapides. J’ai avant tout perdu du temps à essayer de dessiner certains éléments sans passer par là. Pour rappel, voilà le storyboard qui ne faisait que poser l’attitude du personnage. J’ai ajouté de nombreux détails, comme le sac à dos en premier plan, ainsi que l’affiche avec un logo de randonnée qui donne des premières indications sur les motivations du personnage.

Et voilà le principe technique de tout cela : coller des feuille un peu partout autour de la planche pour pouvoir dessiner en hors case et trouver les points de fuite !

perspective2eS’il y a bien quelque chose que les cours de bande-dessinée m’ont appris, c’est que la perspective est essentielle, même pour un dessin non-réaliste. En effet, l’œil est exercé et remarque automatiquement les problèmes. C’est la même chose pour les proportions des personnages ou les défauts sur la position des mains. Et pour s’en affranchir, il faut maîtriser un minimum les principes de base et, surtout, ne pas hésiter à dessiner en dehors de la case !

Pour ceux qui veulent progresser en perspective, je vous invite à visiter le site eMangaka qui propose des cours simples pour maîtriser le sujet. Je m’en suis servi pour dessiner les arches d’un pont en perspective. 

Chercher la case

makingofSur Jotunheimen, j’essaie de ne pas me précipiter et de peaufiner au mieux les planches. Ainsi, la prochaine planche a été stoppée car les dialogues ne fonctionnaient pas correctement. Je continue donc à storyboarder l’histoire.

J’ai commencé à storyboarder l’histoire sur un format A5 avant de m’apercevoir que ce format était trop petit. En effet, je dessine sur un papier d’une surface quatre fois supérieur ! Voilà ce que donnait le storyboard original très succins. Attention, il y a du spoiler, même si ce n’est que la page 2 du livre.

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Cela donne des informations sur l’articulation des dialogues, mais il manque plein de choses. Ainsi, les bulles sont placées sans le texte, ce qui empêche d’anticiper leur taille. Or, le placement des phylactères est essentiel dans une bande-dessinée pour assurer la fluidité de la narration. De même, les décors sont complètement absents, tout comme les poses des personnages. On remarque qu’on retrouve ici le personnage de la vendeuse sous la forme de chatte et que le dessin des personnages est encore “à l’ancienne”, avec des museaux comme sur mes précédents projets.

J’ai donc repris cette basse sur un format A4, afin d’essayer de mieux poser les expressions et les poses. J’ai décidé aussi d’écrire complètement les dialogues afin de mieux visualiser les espaces. Afin d’éviter de trop spoiler, c’est mal écrit !

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Comme d’habitude, j’ai modifié des choses en reprenant le storyboard. J’ai inversé la vue de la première case. Il me paraissait plus pertinent de voir le personnage de la vendeuse de face (on la voit pour la première fois). La case 5 est également modifiée afin d’arrêter le face à face permanent entre les personnages. En effet, même les cases 3 et 4 fonctionnent comme une case unique où les personnages se font face. Comme la vendeuse parle seule dans cette case, c’était l’occasion de la présenter seule, avec une vue de côté. La partie à droite présentera le rayon avec les fameux duvets.

Malgré tout, la case 1 continue à ne pas me satisfaire. Voilà comme était écrite la case dans le scénario :

Alexis regarde la vendeuse, plutôt mignonne et sportive. Vue de manière à profiter de son popotin. Le héros semble ému et timide.

J’ai depuis cessé d’écrire le scénario ainsi, préférant réserver ce genre de considérations pour le dessin du storyboard. J’envisage ainsi que la case un ne montre pas Alexis ou du moins en avant-plan et en aplats de noir afin de bien mettre l’accent sur la vendeuse. Comme souvent après le storyboard, je fais des recherches de croquis pour mieux définir les poses et/ou les décors et perspectives.

Voilà la recherche pour la pose de découverte de la vendeuse.

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Tout ce travail en amont peut paraître laborieux, mais c’est ce qui permet de n’avoir plus que du plaisir lors du dessin de la planche : tout est préparé, il n’y a plus qu’à réaliser. J’ai négligé cet aspect lors de ma dernière planche et je perds actuellement du temps dessus à cause de ça. J’ai bâclé mon storyboard, changé d’avis en route et les poses de mes personnages ne fonctionnaient pas… Bref, rien ne sert de courir, il faut partir à point. Mais allez dire ça à un lapin !

Corrections de planches

makingofAprès avoir dessiné les pages 4 et 5 de Jotunheimen, je me suis aperçu que j’avais oublié un élément de détail : les rideaux à la fenêtre. Ces derniers étaient aussi pensés pour ajouter un peu de volume, de profondeur et de rondeur au décors. Alors, armé de patience, je décidais de redessiner certaines cases.

Tout commence bien évidemment par un diagnostic : combien de cases doivent être redessinées ? Seules deux sont concernées et elles ne sont pas complexes au point de me décourager. Je décide d’en ajouter une autre. En effet, la case 2 de la page 5 me paraissait trop vide, c’était l’occasion de la remplir un peu.

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On refait la déco : en rouge, les rideaux à ajouter.

Pour effectuer la modification, j’utilise une table lumineuse. Cela me permet d’aller vite, tout en gardant ce que j’aime dans les cases. À la table lumineuse, je repasse au crayon. Je me réserve la possibilité de modifier certains éléments. C’est le cas notamment du personnage de la case de droite (dernière case, page 5). J’aime l’expression d’Alexis, mais la forme du crâne ne convient pas (il suffit de comparer à la case de gauche). Ainsi, je l’ai modifié et corrigé pour qu’il corresponde mieux. Au moment de l’encrage, j’en profite aussi pour modifier deux/trois erreurs au niveau de l’encrage (je vous laisse chercher !).

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La feuille avec les 3 cases corrigées.

C’est évidemment la case sans décor qui se retrouve le plus changée. Outre le décor, j’ai modifié légèrement le visage/crâne du personnage. J’en suis toujours au début et je me cherche, donc c’est assez logique. L’angle de vue étant différent des autres, cela me permet de montrer un peu l’extérieur. Car plusieurs cases étaient déjà avares en décors : les cases 1 (juste la table), 2 (redessinée depuis), 4 (décor ajouté à l’encrage) et 5. Flemmardise, quand tu nous tiens… Voilà donc le comparatif entre les deux cases, avec et sans décor :

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Cette démarche d’amélioration, que je n’aurais jamais effectuée auparavant, me vient principalement de mon atelier BD. Cela me pousse à arrêter d’accepter des compromis sur certaines cases moyennes et à repousser sans cesse les limites de mon travail. Le problème est évidemment le temps que cela prend. Mais je pense être prêt désormais à passer plus de temps sur mes planches pour avoir un rendu qui me convient vraiment.

Voilà donc le résultat avec les deux nouvelles pages :

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L’apport graphique sera bien entendu encore plus important avec la couleur !

L’ajout des rideaux peut paraître anecdotique, mais il permet de dynamiser un peu un décor d’intérieur souvent froid et trop rectiligne. L’autre façon de faire est de varier les plans, avec des vues moins “plates” aux perspectives originales. Mais pour voir cela, il faudra attendre la prochaine planche !

Le coup du lapin

article_analyseLe personnage principal de ma prochaine bande-dessinée, Alexis, est un lapin. Mais pourquoi cet animal et pas un autre ? Retour sur un choix pas si évident.

Voir un lapin comme héros de mes bande-dessinée est devenu au fil des ans une tradition. Tout à l’Ego, Le Modèle Vivant, Salle des Profs et L’Éveil des Sens l’ont prouvé… Sans compter les projets des 23 heures de la BD (What About Sex et Un cas d’espèce). La plupart sont de l’autobiographie ou de l’auto-fiction, d’où une certaine continuité. Mais avec Jotunheimen, un récit fictionnel, j’avais la possibilité de changer d’animal. Alors pourquoi rester sur le lapin ? Car au départ, mes premiers personnages étaient des êtres humains (Steven & Norbert) avant le premier animal qui fut Blongo, un hippopotame. Cet animal était d’ailleurs mon véritable animal totem. C’est pourquoi on le retrouvait dans Tout à l’Ego sous la forme de Petit Hippo. Mon tout premier dessin sur la toile fut d’ailleurs un hippopotame !

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Mon premier dessin publié sur internet

Ceux qui ont pu me rencontrer savent que l’hippopotame me correspond peu physiquement et il m’était difficile de me projeter dans cet animal. Il m’a donc fallu trouver un autre animal qui me paraissait plus adapté. Car l’intérêt du dessin anthropomorphe est justement de lier un aspect physique et psychologique avec l’image que l’on se fait d’un animal. Ainsi, vous êtes nombreux à me poser la question rituelle : « mais pourquoi un lapin ? »

Rechercher la facilité ?

Si pour Jutunheimen je suis parti sur le même animal, c’est avant pour n’avoir rien à changer ! Ne pas avoir à se triturer les méninges pour trouver un animal adéquat a forcément des avantages. Mais avec mes avis de changer graphiquement de style, mon travail de recherche reste le même. Ainsi, le museau et les oreilles du lapin seront très différentes entre L’Éveil des Sens et Jotunheimen. J’aurais pris un autre animal que cela m’aurait demandé autant de temps de travail. Cependant, je sais qu’en gardant le lapin, beaucoup vont interpréter mon récit de fiction comme une auto-fiction ou, plus encore, comme une autobiographie. Cela m’a toujours amusé, ce n’est donc pas un frein en soit !

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Malgré tout, dessiner le même animal est aussi l’occasion d’améliorer son dessin en faisant évoluer le personnage. D’avoir influencé par Mickey (Walt Disney), dont on retrouve le museau, je me tourne ensuite vers les production de Fabrice Tarrin, dont je ne parviens pas à retrouver alors la subtilité. Le museau se fait plus fin, les oreilles un peu moins longues et droites. Je finis par abandonner les yeux “complexes” en abordant le point sous l’influence du Combat Ordinaire de Manu Larcenet, entre autres. J’arrive à travailler l’expressivité malgré les limites techniques de ce genre de dessin. Après beaucoup d’efforts, j’arrive enfin à rajeunir le lapin pour dessiner L’Éveil des Sens. Pour cela, un museau plus court, une joue plus basse (qui arrondit le crâne) et des petites oreilles. Enfin, pour Jotunheimen, mes influences vont vers un dessin plus réaliste. Outre Oscar Marin qui m’a sacrément aidé avec Solo, on peut citer Blacksad de Guarnido & Diaz Canales et surtout Le Vent Dans Les Saules de Michel Plessix. Ces bande-dessinées me rappellent que mes animaux sont finalement peu caractérisés.

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L’évolution des personnages lapin dans le temps

J’essaie donc de me libérer. Mon dessin plus réaliste m’a ainsi permis de dessiner quatre lapins d’une même famille suffisamment différents. La forme du museau, des oreilles et du crâne sont adaptés. Une révolution pour moi, car le fait de dessiner des animaux me permettait aussi de masquer mes problèmes de différenciation des personnages. J’en profite aussi pour bosser un peu plus les vêtements et accessoires. Un personnage se caractérise aussi par cela !

L’historique du lapin

lapinotLe lapin garde chez moi une grande marque affective de par le personnage de Lapinot (par Lewis Trondheim), l’une de mes séries de bande-dessinée préférées (et qui m’a donné envie de faire de la BD). Je peux noter aussi que Marvin Rouge (Donjon par Lewis Trondheim & Sfar) est aussi un personnage qui m’a marqué. Plus prosaïquement, quelle image peut renvoyer un lapin ? Un lapin est sympathique, mignon, fragile. On a envie de le protéger et de lui faire des câlins (le meilleur exemple étant Eusèbe dans De Capes et de Crocs de Masbou et Ayroles). Voilà un animal qui est ainsi parfaitement adapté à mon personnage.

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Une des difficulté est les grosses joues du lapin. Je ne suis pas fan des designs de Bugs Bunny ou de Coco Lapin. De même, un lapin peut vite troquer son côté innocent/naïf pour la bêtise (comme le personnage Garenni dans Canardo par Sokal). C’est donc tout un travail de parvenir à ne pas donner cette impression de naïveté trop poussée. Cette difficulté à dessiner un lapin plus réaliste a été suffisamment poussée pour que j’hésite à changer d’animal. Après tout, je l’avais bien fait pour Laura, passée de féline (chatte, renarde) à souris.

Sortir des mammifères.

MeilleurAmi_01Depuis que j’ai démarré le dessin anthropomorphe, j’ai du mal à sortir des mammifères. Ils le sont presque tous. On retrouve ainsi beaucoup d’animaux peu originaux : lapin, chat, chien, ours (et son cousin le panda), souris, écureuil… Ainsi, certains personnages ont été modifié d’ors et déjà afin d’amener un peu de visibilité à d’autres espèces moins utilisées par le passé : le perroquet à la place de l’écureuil pour la vendeuse, un chimpanzé à la place du lion pour le meilleur ami… Un lézard est prévu également dans l’histoire. Cet élargissement avait déjà été effectué timidement dans mes bande-dessinées précédentes et je souhaite le continuer.

Le choix d’un animal pour un personnage n’est pas innocent. Il est souvent porteur de sous-entendu et ne peut pas être fait à la légère. Mais outre le sens que l’on peut vouloir donner à ce choix, c’est aussi une question de plaisir et de variété graphique. Car à force de dessiner tout le temps les mêmes animaux, on se perd dans des automatismes et la lassitude peut pointer le bout de son museau. Heu… De son nez !

Liens
Phylacterium : Ichtyoscopie printanière
Wikipédia : Liste des lapins de fiction